Comme nous l'a si bien proposé Kylian, voici un piti topic où exposé ses textes.
Je commence avec les trois seules pages que j'ai sur le pc :
Le soleil brille, les oiseaux chantent. Le doux vent frais joue avec les branches des arbres. Tous les animaux s'agitent fébrilement, dans cette douce chaleur de fin d'été.
Les hirondelles entament une danse magique dans le ciel azur, les papillons virevoltent au milieu des fleurs, les écureuils gambadent dans l'herbe verte...
Même les arbres semblent chanter en un murmure millénaire.
La nature entière est en fête, pour accueillir sa fille.
Sa chevelure noire flottant au vent, ses yeux vert émeraude brillants d'émotion, son fin visage rayonnant de bonheur, sa tunique blanche immaculée virevoltant derrière elle, son aura douce et apaisante diffusant la paix autour d'elle, Erylis avançait. Dans son sillage, fleurs et papillons apparaissaient comme par enchantement. Elle ne savait ni son histoire, ni la raison de sa présence ici. Mais elle était heureuse, et la nature l'était aussi.
Ainsi était Erylis DouceBrume, jeune nymphe insouciante offerte à la vie.
La nuit tombait. La lune s'apprêtait à apparaître, tandis que le soleil éteignait ses derniers rayons.
Erylis ferma les yeux, son doux visage lumineux semblant reflétait la lune en un halo fantomatique et mystérieux.
Elle écarta les bras, et se mit à chanter.
Sa voix douce et envoûtante s'élevait dans le couchant, et elle commença à danser. Elle virevoltait avec grâce, et sa complainte lyrique offerte à la lune s'accordait avec harmonie à son ballet aérien. Elle semblait ne pas toucher terre, et dessinait des arabesques enchanteresses avec ses bras fins de déesse.
Déesse... Oui, elle semblait être l'incarnation d'une divinité représentant la grâce, la beauté et la perfection.
L'infini...
L'irréel...
L'absolu...
Un puissant vaisseau voguait au grès des vents, dans une mer de nuages. Le ciel semblait être une couronne de fleurs colorées qui entourait le navire.
A la proue de cet imposant bâtiment, elle siégeait telle une sirène au bord de cet océan ouaté. Le vif éclat de sa voix s'élevait telle une prière aux muses célestes.
Ses yeux vert émeraude étaient clos, sa respiration presque inaudible.
Sa chevelure de nuit tombait en boucles brunes sur ses seins d'albâtres, et son impossible beauté rayonnait en une aura divine. Elle portait pour seul habit un pan de tissu blanc ceint à la taille par un anneau d'argent.
Ses hanches pleines chuchotaient d'indécentes promesses, et ses jambes parfaites étaient ornées de bracelets d'or et d'argent.
Les vents soufflaient son arrivée, et le doux zéphyr caressait sa peau de velours.
Une masse sombre se dessinait au loin, comme un roi des temps anciens siégeant sur son trône de pierre.
La forteresse ouvrait ses portes d'ébènes, et les vents se turent, comme coupés dans leurs conciliabules par la majesté du lieu.
Un silence respectueux se fit, tandis que le vaisseau franchissait les portes de la citadelle. Puis tout à coup le bruit revint. Les marins saluaient leurs familles qui attendaient sur les quais, les voyageurs qui s'affairaient, rassemblant leurs bagages et familles avant l'accostage.
Troublé dans sa contemplation muette, elle soupira, puis se leva, en un mouvement sensuel qui mit en valeur ses formes voluptueuses.
Elle rassembla ses effets, puis s'apprêta elle aussi à descendre.
Un cri retentit, puis une voix résonna pour annoncer le début du débarquement.. Elle attendit que la foule se fut dispersée, puis descendit à son tour.
Elle s'arrêta un instant sur les quais, son sac jeté sur son épaule, pour saluer une dernière fois l'immensité majestueuse du ciel, puis elle se détourna et s'enfonça dans les sombres ruelles de la cité.
Erylis se promenait dans les ruelles de la cité. Ses pas sonnaient, comme un défilé sonore empli de grâce et de majesté, sur les pavés de pierre. Depuis des heures, elle errait dans ces ruelles sombres. Elle ne savait comment elle s’était retrouvée ici, petite silhouette frêle et gracile au milieu de la foule compacte. Sans but, sans attache. Elle observait, semblant vouloir imprégner sur sa rétine le moindre mouvement, et elle enregistrait dans sa mémoire le moindre fumet de pain frais, le moindre froissement de tissu. Les bas-fonds de la cité était une véritable cour des miracles. Meurtres et viols étaient habituels, voir même naturels… Les catins se mêlaient aux mendiants, tandis que dans la foule grouillante, les voleurs faisaient leur office. La misère qui accablait ce peuple isolé et abandonné était indescriptible. Ce ramassis de coupe-jarrets et de brigands en tout genre semblait être une tâche sombre au cœur de cette cité de lumière et de beauté, une tâche que l’on essaye d’oublier, mais que l’on ne peut gommer de sa mémoire tant elle déchire le cœur.
Misère, faim, malheur.
Depuis son arrivée dans cette cité, la veille au soir, Erylis cherchait. Elle ne savait quoi encore, ou bien qui. La nymphe se souvenait de l’appel. Elle pivota soudain, et s’enfonça dans une petite venelle. Elle appuya son dos contre un mur, puis ferma ses yeux. Derrière ses paupières closes, des images défilaient. La jeune femme se baignait, comme à l’accoutumé, dans les eaux claires du lac de SombreLune. La forêt où elle vivait semblait emplie de milliers de petits bruits. Zéphyr jouant avec les branches, appel nocturne de la meute en chasse, plainte stridente de la vieille chouette solitaire, crissements des insectes… La lune était pleine, et rayonnait en un halo fantomatique sur la surface lumineuse du lac. Le vent s’accentua, un murmure s’éleva. Une voix douce aux accents enchanteurs résonna dans la clairière :
« Entend-moi… Viens à moi… Suis la voie des enchantements… 2coute la voix des enchantements… Trouve-le… Trouve-moi… »
La voix se tut, le vent se calma. Dans la forêt soudain silencieuse, Erylis restait immobile, comme essayant de ce convaincre qu’elle n’avait point rêvé. Quelques jours après, elle partie, bien décider à retrouver la voix qui lui enjoignait de la rejoindre. Elle avait d’abord voyagée à cheval, puis avait pris un vaisseau volant pour atteindre la Citadelle Noire, où elle pensait pouvoir trouver de l’aide.
Erylis réouvrit les yeux. La nuit était tombée depuis un long moment, semblait-il, et la ruelle était déserte. Elle entendit soudain du bruit, et son sang se figea. La nuit, dans des venelles comme celle-ci, toute sorte de bandits pouvaient se cacher dans un coin sombre, à l’abris des regards, pour surgir l’instant d’après, et faire couler le sang.
La jeune femme tendit l’oreille.
Quelqu’un marchait. On pouvait entendre son pas hésitant résonner sur le sol de pierre. Il semblait exténué, et il tremblait de tous ses membres frêles. Il était vêtu d’oripeaux malodorants, et un suaire sale et déchiqueté masquait son visage. Ses mains fines étaient noires de saleté, et ses ongles crasseux étaient recouverts de boue. Sa peau était diaphane, parcheminé comme un vieux papier poussiéreux que l’on aurait oublié sur une étagère.. Son pied buta contre une pierre, et il s’étala sur le sol. Un pan de capuche se détacha, révélant son visage.
Il était jeune, à peu près une quinzaine d’année. Son visage aux traits doux était émacié, car marqué par la faim et la soif, et abîmé par des cicatrices et des blessures. Ses cheveux, qui devaient être blonds à l’origine, était d’une couleur indéfinissable tant ils étaient recouvert de poussière et de déchets.
Ses yeux bleus étaient emplis de larmes, mais au fond de son regard brillait une lueur d’espoir. Ses pupilles azurés incarnaient la tristesse, marquées à jamais par un désespoir sans fin. Ses yeux semblaient emplis de toute la misère du monde, mais cela ne suffisait pourtant pas à éteindre la flamme d’espérance qui brillaient au fond de son regard fiévreux. Un espoir puéril et candide, mais rempli de fougue et de courage plein de maturité.
Cet enfant était le symbole même des conditions de vie de cette faune abandonné du reste du monde, cloîtrés dans leur pays à part, un pays où ce qui compte, ce n’est ni la force, ni la violence, ni le pouvoir, ni l’argent. C’est l’espoir… L’espoir, et le rêve. Oui, quand on ne peut fuir le monde qui nous étouffe, la seule façon de s’évader, c’est de rêver. Cette chose que chacun possèdent, mais que seuls peu d’entre nous savent apprécier à sa juste valeur :
L’imagination.
Ses yeux s’emplirent de larmes, mais il continua à avancer, en rampant, comme si sa vie en dépendait. Il haletait, et son cœur battait à tout rompre dans sa poitrine. Il tendit une main décharnée à la nymphe et prononçait des mots d’une voix presque inaudible :
« Aidez… moi… S’il… vous plaît…
Erylis s’approcha, se pencha vers lui, et lui caressa la joue. Elle lui prit la main, et le releva. Le jeune homme se blotti contre elle.
Il leva la tête. Ses yeux étaient vitreux, son regard contemplait des régions oubliées que l’on découvre aux portes de la mort. Une verte prairie, un soleil couchant, une forme lumineuse qui avance. Elle est entourée d’un halo éblouissant, et son visage était tout de lumière. La dame blanche… Non… ce visage… cette impression de déjà vu… Bien sûr :
« Lyane… »
Il dressa la tête, regarda longuement la nymphe, tendit son maigre cou, et posa ses lèvres sur la bouche d’Erylis. Elle sursauta en sentant la douce pression des lèvres du garçon, mais se laissa faire. Le jeune homme dit :
« Lyane, je savais… que je te… reverrai… avant la fin… »
Il ferma les yeux, sa tête roula sur le côté, il s’affala, inerte, dans les bras de la nymphe affolée.
« Dommage » pensa-t-il, avant de s’enfoncer dans les ténèbres.